GwTy - Europa, Europa !

Les mains croisées dans le dos, arborant une expression sévère,Ducoinovic se glissa silencieusement dans le dos du jeune homme concentré qui, assis à un vieux pupitre, annotait une carte en tirant la langue.
- "Eh bien mon ami...votre travail avance-t-il ?"
Haiduk Seselj sursauta, et jeta un regard consterné à son ouvrage, troublé par le dernier trait - imprévu - de sa plume surprise.
- "Je...j'en termine, colonel."
Le coach des Myrmidons se pencha légèrement vers l'avant, et jaugea la qualité des efforts de son remplaçant, attelé à une tâche inhabituelle.
Le jeune Serbe n'était guère plus talentueux dans un bureau que sur un terrain. Mais il savait le joueur au bord de la dépression, et prit le parti de le ménager.
Ducoinovic fronça les sourcils et s'efforça de ne point paraître trop maussade.
- "Heum...oui...je vois que vous vous êtes appliqué. C'est...c'est une carte honnête que voilà.
- J'ai fait de mon mieux, coach. J'ai tout donné.
- Bel effort, mon gars ! Bon sang, c'est presque illisible !
- Est-ce que ça vous plaît ?
- Da. C'est...suffisant. Oh...les couleurs sont merdiques !
- Je peux retourner à l'entraînement, coach ?
- Fais donc, Haiduk. Les bloqueurs ont justement besoin d'un lièvre."

Resté seul dans son bureau, le colonel Ducoinovic s'empara du document à l'encre encore humide et l'examina attentivement.
Seselj, conformément à ses intructions, avait complété un fond de carte du continent européen.
Ultraball 2105. Un aperçu des franchises européennes.
Le résultat était malpropre, et Bozidar dut plisser les yeux pour discerner puis décrypter certains ajouts de son scribe amateur.
La forme était navrante, mais le fond instructif.
Les équipes européenne d'Ultra-ball avaient été massivement identifées et placées sur la carte. Il ne devait pas manquer grand monde.
Seselj avait dû se documenter et enquêter, afin de pouvoir localiser certaines franchises aux noms opaques.
Ainsi donc, Necropolis se trouvait (dans ce plan) au coeur des Carpates !Les cités d' Eternam et Speedball étaient filles d'Albion !
Le colonel posa son index sur la carte et la parcourut du Nord au Sud, suivant les délicats contours des côtes dentelées du très vieux continent.
Les Volcaniks de Reykjavik étaient l'équipe la plus septentrionale de l'Europe ultraballienne.
Les Guépards de Palerme, la plus méridionale.
Le doigt du coach belgradois s'attarda sur la France.
Impressionnant...
Ce pays concentrait sur son sol un nombre prodigieux de franchises et la pléthore de jeunes équipes d'Open indiquait un formidable taux de pénétration du Jeu dans l'hexagone.
Au sein de cet Eden de l'Ultraball, la Bretagne se montrait particulièrement sensible au sport ultra-violent. Pas moins de six équipes Open, s'efforçant de grandir à l'ombre des Teddy Bears rennais.
Grande-Bretagne, Scandinavie et terres slaves présentaient un front solide, même si Ducoinovic s'étonna de l'absence de franchises baltes ou polonaises, au regard du nombre élevé de professionnels de qualité exportés par ces provinces.
Déception. Pas de représentation hellénique ou turque.
Une catastrophe : Le Sud-Ouest européen demeurait fermé à l'Ultraball. Portugal, Espagne et Maghreb boudaient le jeu qui enflammait les populations de Rome, Moscou, Paris ou Belgrade.
Bozidar Ducoinovic haussa les épaules.
Madrid finirait sans doute par émerger sur la scène européenne, un univers (notamment du point de vue du Jeu) d'une immense richesse, et d'une belle diversité.
L'entraîneur belgradois reposa sa mauvaise carte.
Il s'était explosé les yeux, mais se faisait à présent une idée plus précise de la répartition et du placement des équipes de la zone Europe.
Eh bien...voilà qui promet de fameux derbies soupira-t-il.
Une migraine commençait à ravager son crâne.
J'aurais mieux fait de mettre mes lunettes...